J+1 : Confrontation
Rêve ou réalité. Mon réveil est confus. Un coup d’œil sur le
pantalon qui repose sur la porte et je réalise. Réalité. Tout ce qu’il m’avait
dit était vrai. Absence de douleur. Etrange. Faire comme si de rien n’était. La
vérité me suffit. Un poing frappe avec force sur mon estomac… Je le vide dans
les toilettes. L’odeur de café frais embaume l’appartement. Par-dessus le
bar de notre cuisine « américaine », je l’aperçois, inondé par la
lumière du soleil. Il est de bonne humeur. Le sourire aux lèvres, il chantonne
et plein d’attention à mon égard il me lance : - « Bien
dormi »? Mue par je ne sais quel ressort, ma raison m’abandonne… - « J’ai
fait un cauchemar. Je ne me sens pas bien. - C’est
pour cela que tu as vomi ? Raconte-moi. - Et
bien…je me regardais dans un miroir mais l’image qu’il me renvoyait n’était pas
la mienne mais celle d’une femme sans visage. - C’est
bizarre ça. Il avale une gorgée de café. - Oui.
Un visage sans traits où il apparait la lettre S… - La
lettre S ? - Oui,
S pour un prénom. Les couleurs sur son visage s’estompent. Il semble
comprendre. Imperturbable, je poursuis : - S
comme mon deuxième prénom, Sofia. Suis-je en train de devenir folle ? Je
ne sais pas quoi en penser. Cela fait des jours que j’ai ce point dans la
poitrine qui m’empêche de respirer. - Tu
commences à m’inquiéter. Combien de fois t’ai-je dit d’aller chez le médecin.
Je ne comprends pas ce que tu attends, c’est peut-être grave. - Tu
as raison. Je crois que c’est grave. Il va falloir m’interner. Je me fais des
films. Un mal me ronge de l’intérieur et je ne sais comment m’en débarrasser.
Une femme me guette. Elle veut prendre ma place dans ton lit. Elle s’appelle
comme moi, Sophie. » Suspension du temps. Nous sommes face à face. Je l’observe,
lui, le médecin qui doit me guérir par la vérité. Il ne répond pas. - « Est-ce
que tu connais une autre Sophie que celle de Nice ? Je murmure presque ces
derniers mots. - Oui,
j’en connais une autre - Qui
est ce ? - Une
aventure d’un soir, rien d’important » A cet instant, je veux arracher son cœur avec mes dents, le
jeter par terre, le piétiner puis le balancer dans les chiottes, là où est sa
place. Au lieu de cela, je garde mon calme. - C’est
ta maitresse en somme. Ou l’as-tu connue ? - Aux
Sables d’Olonne, pendant le tournage de la série « Complément d’enquête ». - C’était
quand ça ? Il y a quatre mois, non ? Et depuis, plus rien ? - Non, plus rien. » Il affiche un air penaud alors que moi je ne vois que celui
qui a osé me trahir, me tromper, me souiller, écraser le peu que nous avions
construit. - « Tu
veux dire que tu ne l’as jamais revue ? - Je
l’ai revue deux ou trois fois. C’est devenu une copine On boit un café de temps
en temps… - C’est
ça ! Avec un supplément « coucherie », je suppose. Toutes tes
copines ont-elles cette fonction particulière ? - Tu
ne sais pas ce que tu dis. - Oh
que si…C’est clair maintenait. Je n’avais jamais compris pourquoi toutes tes
copines étaient tes ex, maintenant je sais. Tu consommes d’abord, tu
sympathises ensuite…Comment ça s’est passé ? - Je
n’ai pas à te dire ce genre de choses. - Ben
voyons, Monsieur fait son galant homme maintenant. - Cela
ne regarde qu’elle et moi…C’est du passé. - Ah !
Non ! Cela me regarde aussi je te signale. Je suis la femme avec laquelle
tu vis, tu t’en souviens. - Ecoute,
tout cela me semble si irréel…Ces aventures n’ont aucune consistance…C’étaient
des moments hors du temps… - Non
mais j’hallucine là ! Un espace « hors du temps », j’ai bien
entendu ? - Oui…Cela
n’a rien à voir avec notre couple…Ces moments font partie de mon espace…C’est
ma vie, mes envies. - Et
moi, je dois accepter, c’est ça ? - Tu
n’y es pas obligée. - Ce
que tu as fait est réel Florent. Les sentiments que j’éprouve en ce moment sont
réels, je te l’assure…Cette femme aussi est réelle. Tu es réel et la vie que
nous avions l’était aussi. Les actes ont des conséquences… Son téléphone sonne avec insistance. - Tu
ne réponds pas ? - Non. - Tu
es attendu quelque part peut-être ? » Il baisse la tête.